Données matérielles et analyses stratigraphiques : des bases de données aux exploitations numériques

« La Fabrique matérielle du visuel. Panneaux peints en Méditerranée XIIIe-XVIe siècles » et « La Fabrique de l’art. Couleurs et matériaux de l’enluminure », respectivement coordonnés par Sigrid Mirabaud (INHA) et Charlotte Denoël (BnF), sont deux programmes de recherche initiés à l’INHA portant au centre de leurs questionnements la matérialité des œuvres à travers l’étude des rapports physico-chimiques des analyses de leurs stratigraphies.

Ces deux projets font chacun l’objet d’une base de données sur AGORHA, la plateforme des données de la recherche de l’INHA.

Permettre la recherche parmi les informations présentes dans les couches stratigraphiques analysées était l’un des points prépondérant de ces programmes, aussi a-t-il été décidé qu’ils feraient l’objet d’une exploitation commune sous Omeka-S¹. En effet, AGORHA ne permettant pas à ce jour de rechercher aussi finement dans les données matérielles, une exposition sous Omeka-S est apparue comme la solution qui allait permettre aux internautes de naviguer tant parmi les œuvres que parmi les différentes strates analysées.

Pour ce faire, une structuration des données a été définie en amont de la saisie des notices dans AGORHA afin de rendre exploitables les données matérielles. L’enjeu était en effet de concilier la description des analyses, à la fois dans leur nombre (plusieurs échantillons analysés dans différentes couches stratigraphiques sur une seule œuvre), et dans leur détail (nature de la couche, matériau analysé, technique d’analyse, date d’analyse…). Ce modèle descriptif devait être commun aux deux programmes malgré leurs objets de recherche différents. La « grammaire de saisie » qui a été établie devait accompagner les équipes de chercheurs et chercheuses dans la saisie de leurs notices et garantir ainsi une unicité dans la structuration des données pour chacune des deux bases.

Cela étant défini, une seconde structuration des données, également communes à ces deux bases, a été mise en place en vue de leur intégration sur l’instance Omeka-S depuis AGORHA.

Deux modèles de ressources Omeka-S ont ainsi été créés : l’un pour les œuvres, qu’il s’agisse des icônes peintes ou des manuscrits, et le second pour les couches stratigraphiques analysées sur chacune de ces œuvres. Un alignement ontologique a été opéré afin de structurer ces deux modèles de ressources et une chaîne de traitement des données, réalisée par Anne Bugner (stagiaire de l’ École nationale des chartes (master TNAH) à la BnF), a permis la génération de deux sets de données pour chacun des programmes : l’un comprenant toutes les données descriptives des œuvres, le second comprenant les informations relatives à la matérialité des couches stratigraphiques pour chaque strate analysée.

Enfin, un thème Omeka-S a aussi été développé, en adéquation avec la spécificité et la finesse des éléments du programme.

D’un point de vue utilisateur, un aperçu des données descriptives de chaque notice est disponible via des cartels, grâce auxquels l’internaute peut accéder à la notice complète de l’œuvre ou de la couche stratigraphique décrite. Les liens effectués entre les œuvres et les différentes strates permettent également à l’internaute de naviguer depuis l’œuvre mère vers la couche stratigraphique, ou inversement.

Pour exploiter au mieux la richesse de ces données, deux datavisualisations, toujours communes aux deux programmes, ont été développées par Théo Burnel (stagiaire de l’ École nationale des chartes (master TNAH) à la BnF) : une visualisation cartographique avec la bibliothèque logicielle Leaflet.js² rendant compte du lieu de création de chacune des œuvres, et une chronologie développée avec Vikus³ permettant de filtrer par matériaux présents dans les œuvres et de rendre ainsi compte de l’importance – ou de l’absence – de leur utilisation au cours de la période étudiée.

Enfin, grâce à la mise à disposition des images publiées sur AGORHA via les standards IIIF, certaines images des manuscrits issus du programme « La fabrique de l’art. Couleurs et matériaux de l’enluminure » ont fait l’objet d’une annotation sémantique, rendant compte des différentes zones d’échantillons analysés et de leur composition. Ces images sont également exposées sur l’interface Omeka-S grâce à une visionneuse IIIF dédiée.

1. OMEKA-S est un système de gestion de contenu permettant la création de site web de manière standardisé tout en restant personnalisable. Il offre également des fonctionnalités tierces grâce à des modules dédiés. URL : https://omeka.org/s/ ↩︎
2. Leaflet.js est une bibliothèque logicielle Javascript ouverte créé en 2011 par Volodymyr Agafonkin pour le développement de cartes numériques interactives. URL : https://leafletjs.com/ ↩︎
3. VIKUS est un outil de visualisation libre centré sur l’image et développé par Christopher Pietsch. URL : https://github.com/cpietsch/vikus-viewer ↩︎

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